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Définition et présentation de la sureté / sécurité

Sûreté – sécurité: Au cours de la scolarité du MBA, l’objectif est de vous apporter une vision globale des nouvelles menaces, tant sur le plan de la sécurité que de la sûreté. La sécurité se définit par les moyens mis en place pour se prémunir des risques à caractère accidentel, dont l’origine est involontaire, tels que les catastrophes naturelles, les incendies, les accidents industriels… . La sûreté permet la prévention des actes malveillants, dont l’origine est une réelle intention de nuire. Cela concerne par exemple les vols, destructions d’enseignes, attentats terroristes, incendies volontaires.
Il est important de noter que dans les pays anglophone le terme safety désigne la sécurité et le terme security signifie sûreté.

Introduction de mémoire : La sûreté au sein des ERP culturels

Mots clés : sûreté et sécurité, établissement culturel, sûreté et culture, sécurité et
culture, vulnérabilité des lieux culturels.

« Le concert des Eagles of Death Metal a débuté presque une heure plus tôt, à 20h51, Jesse Hughes s’en souvient, il a regardé sa montre en entrant en scène. Peu après, pour animer le show, il a sorti le cran d’arrêt acheté l’après-midi et l’a planté dans une des enceintes. La salle est bien remplie, les spectateurs sont serrés comme des sardines. “Waouh, il y a le feu, ça va être chaud“, se dit le batteur. Les quarante premières minutes de concert sont fantastiques. Le son des Eagles of Death Metal bastonne. Le public de fidèles apprécie. » Par cet extrait issu du livre « Les coulisses du 13 novembre (1) » Jean-Michel Décugis, François Malye et Jérôme Vincent décrivent l’atmosphère du concert qui se déroule au Bataclan quelques minutes avant la tragédie qui fera, tous lieux confondus cette nuit d’attentats, 130 morts et 684 blessés. Par ces mots des musiciens, malheureusement et tristement prémonitoires, et au travers des témoignages des survivants, les auteurs montrent comment l’impensable va frapper la capitale autour de lieux symboliques de nos modes de vie : des terrasses de café, des restaurants, une enceinte sportive et une salle de concert.

Tous les pans des sociétés occidentales peuvent être touchés par des attaques terroristes. Les lieux culturels n’y échappent pas : ayons également en souvenir l’attaque de quarante terroristes tchétchènes au théâtre Doubrovka de Moscou prenant en otage plus de neuf-cents personnes présentes pour assister à une comédie musicale. Les rassemblements liés au spectacle vivant attirent un public varié et nombreux. Ils constituent donc des cibles potentielles singulièrement sensibles. Les actes les visant affectent particulièrement l’opinion publique car il s’agit souvent d’un public jeune, frappé alors qu’il venait seulement passer un bon moment en toute innocence.

L’insouciance et le divertissement sont les maîtres-mots lors de ces évènements. De tout temps la culture a eu pour unique but de divertir l’Homme et d’élever son âme loin des turpitudes quotidiennes comme le précise le pianiste canadien Glenn Gould (2) : « l’objet de l’art n’est pas de nous soulager momentanément d’une éjection d’adrénaline, mais bien plutôt de construire progressivement, au fil de toute une vie, un état d’émerveillement et de sérénité. Au plus haut de sa mission, la musique n’a presque plus rien d’humain ». Dès lors, l’art se drape également d’une dimension quasi-mystique.

La construction des théâtres, elle-même, a longtemps été pensée pour que le divertissement soit à la fois sur scène et dans la salle. Les théâtres dits « à l’italienne » en sont la parfaite illustration. Au XVIII ème et XIX ème siècle, il s’agissait plus de s’y montrer que d’aller y « élever son âme » au son de Mozart, Rossini ou Verdi ! Wagner l’avait d’ailleurs parfaitement identifié et a induit une révolution majeure dans l’opéra : la salle de Bayreuth « unidirectionnelle » – de principe identique à celui de nos cinémas actuels – est conçue pour que le spectateur soit uniquement focalisé physiquement, visuellement et mentalement sur ce qu’il se passe sur scène.
La fosse d’orchestre dissimule également la quasi-totalité des musiciens. L’idéologie du spectacle influe sur la conception architecturale.
Aujourd’hui les constructions de salles modernes agrègent les anciens principes pour garantir au public le plaisir des yeux, des oreilles et leur sécurité. Au milieu du XIX ème siècle, il fallut un énième drame pour qu’une réflexion soit menée sur la prévention des risques au sein des établissements recevant du public (ERP) et en particulier le respect des règles édictées. En 1947, lors d’une projection d’un film, un feu se déclare au sein du cinéma « le Select » à Rueil-Malmaison. Les 580 personnes présentes ce soir-là tentent d’évacuer. Mais elles se retrouvent bloquées au sein d’une cour intérieure sans issues. 89 d’entre elles périssent asphyxiées. La non-observation du décret du 7 février 1941 qui mena à ce triste bilan eut pour conséquence, comme souvent après une grave crise, de lancer une nouvelle réflexion sur la prévention du risque incendie dans les établissements et en particulier son application. Le décret du 13 août 1954 précise le classement des établissements en catégories d’après la jauge totale des personnes accueillies. Puis l’arrêté du 23 mars 1965 devient le véritable premier règlement de sécurité. Il classe les ERP par type, impose des vérifications techniques régulières, des contrôles par des commissions notamment composées d’un pompier référent à la livraison et pendant toute l’exploitation du site ainsi qu’une définition de périodicité.
Dans nos sociétés contemporaines il semble que la prévention de l’incendie soit une donnée maîtrisée et encrée dans la culture des ERP. Les progrès des moyens de détection, d’intervention et les réflexes d’évacuation sont acquis et connus de tous, publics ou professionnels, tant sont-ils explicités dès l’école aux enfants ou intègrent nos propres foyers avec les détecteurs de fumée par exemple. Mais qu’en est-il face aux nouveaux risques émergeants ces dernières années, qu’ils soient de simples actes malveillants ou actes terroristes ? Dans son « Baromètre des pratiques culturelles des Français en matière de spectacles musicaux et de variété » (Annexe 1), l’institut Harris Interactive présente un sondage concernant « le regard des spectateurs sur les mesures de sécurité » en 2017, soit deux ans après le Bataclan.

A la question sur leur sentiment de sécurité lors de spectacles, 79 % d’un échantillon de 1020 personnes se disent « en sécurité » (67 % « très en sécurité » et 12 % « plutôt en sécurité »).
Paradoxalement, à la question « vous arrive-t-il de vous sentir en insécurité ? » 44 % des interrogés répondent oui. Il y a donc une différence entre le sentiment de sécurité en augmentation lors d’un évènement, probablement due aux différents dispositifs spécifiques mis en place après les attentats de novembre 2015 et un sentiment d’insécurité général, lui aussi en augmentation.

Dans la « Proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés » (3) , l’article 25 vient compléter l’article L. 315 du code de la sécurité intérieure (relatif au port d’arme des forces de l’ordre) en lui ajoutant l’article L. 315-3 : « Le fait qu’un fonctionnaire de la police nationale ou un militaire de la gendarmerie nationale porte son arme hors service, dans des conditions définies par arrêté du ministre de l’intérieur, ne peut lui être opposé lors de l’accès à un établissement recevant du public ».
En réaction, huit organisations du secteur culturel s’émeuvent de cet article permettant le port d’arme dans les ERP. Mathilde Blayo, pour La Lettre du Musicien (4) , interroge Jean-Michel Mathé, trésorier de France Festival et directeur du Festival international de musique de Besançon.
Tout en rappelant qu’il a connaissance du « contexte sécuritaire », il ne pense pas « que c’est avec une réponse à l’américaine, en permettant le développement du port d’arme, qu’on augmentera la sécurité ». Partant du constat que « dans les festivals de musique actuelle, les festivals d’art de rue, mais aussi les boîtes de nuit qui font partie des ERP, il y a de l’alcool, des conditions réunies pour qu’il y ait des dérapages. On ne peut pas garantir qu’il n’y en aura pas ». Il précise également « par ailleurs, comment pouvons-nous assurer, lors des contrôles de sacs, que la carte de police qui nous sera présentée n’est pas falsifiée ? Cette disposition nous paraît créer plus de risques qu’elle n’en empêche. Nous ne voulons pas que soit banalisée la possibilité de venir dans une salle de spectacle en étant armé. C’est une banalisation très problématique pour nos lieux, mais elle pourra s’appliquer à tous les ERP : les magasins, les restaurants… En tant que citoyen, je me sens rassuré si je vois qu’il y a des personnes en mission, des CRS, qui sont là parce que des risques ont été identifiés. Je ne serai pas avec des personnes armées sur leur temps de loisir ».
Au regard de cet article, nous voyons émerger deux conceptions opposées de la sûreté dans les ERP. D’un côté, le pouvoir régalien qui souhaite assurer la sécurité de tous au travers de la loi, et en réaction face aux crises connues, et de l’autre côté le milieu artistique, qui sacralise ses établissements en ne souhaitant uniquement art et divertissement en son sein, semblant ainsi rejeter tout ce qui peut lui être imposé d’annexe à sa mission première.
Les menaces actuelles, nous l’avons évoqué, ne s’arrêtent malheureusement pas à la porte des lieux culturels. Face à ces enjeux, que ce soit du domaine de la sécurité, des risques naturels mais surtout des actes de malveillance ou de terrorisme (sûreté), le monde des arts ne peut ignorer et repousser plus longtemps ces aspects, également conçus et voulus pour le préserver et le faire perdurer. Ainsi, pour tout responsable d’ERP culturel la question essentielle sera d’un point de vue managérial, stratégique et philosophique : comment aborder la sûreté au sein d’un établissement recevant du public ?
Des clefs d’entrée nous permettent d’aborder une dichotomie, au sens didactique du terme, et de relier la raison à la passion entre deux mondes, celui de la culture d’un côté et celui de la sécurité de l’autre. Claudio Ciborra aborde comme concept central le bricolage (voir Ciborra
1997). Il s’agit d’utiliser des ressources qui sont à portée de main pour résoudre un problème. Il constitue une création locale difficilement reproductible à plus grande échelle. L’improvisation est un deuxième concept qu’il présente. L’improvisation signifie étymologiquement « en dehors du temps ». C’est également un processus créatif en musique, ce qui tend à relier par analogie le domaine des sciences de gestion avec la musique. Elle permet de prendre le temps afin d’éviter, en réagissant en urgence, d’utiliser d’anciennes méthodes en reflexe.
Karl Weick va plus loin en utilisant la métaphore de l’orchestre jazz (voir Karl Weick 1998).
Il y définit une action, l’improvisation, au sein d’un état : une situation improvisationnelle. Un comportement cognitif et collectif intervient dans une situation particulière ; au sein d’une même pièce, d’une même structure, l’apport de chaque improvisation de musicien vient la modifier par la créativité. Il s’agit d’inédits de gestion de situation particulières. Le bricolage de Ciborra et l’improvisation par la métaphore du Jazz de Weick invitent à analyser des situations singulières, exceptionnelles, où les codes sont bousculés. Ils relient l’acte créatif issu des codes de l’art avec la gestion des organisations et des mondes très différents (musique et développent informatique dans l’entreprise). Ces analogies demeurent intéressantes quand on analyse des situations non anticipées où il faudra accepter parfois l’inacceptable, gérer les erreurs, le contexte, engager la résilience et les expérimentations. Dans les deux cas, le bricolage ou l’improvisation, l’humain est au centre de la démarche. Il s’agit d’actions cognitives, donc conscientes. Les analogies permettent de faire comprendre les choses, d’exprimer des idées et des concepts avec force en utilisant les aspirations et les connaissances des personnes auxquelles nous nous adressons. Mais avant d’aborder le thème de la sûreté par la méthode analogique, nous étudierons en première partie ce qu’est la culture et le monde culturel en France. Il faut comprendre son histoire, son incarnation et sa place dans la société. Dans un deuxième temps, nous analyserons la nécessité de protéger le secteur culturel par une approche des risques qui lui sont liés, de son contexte, de son économie, de ses acteurs, préambule à toute ébauche de stratégie. Enfin nous utiliserons quelques exemples d’outils managériaux en utilisant le prisme analogique comme le suggère Weick afin d’essayer de relier deux mondes que tout semble opposer, la culture et la sûreté. Seule une vision globale du secteur nous permettra de trouver des clefs de management afin d’aborder la sûreté au sein d’un ERP culturel, véritable changement, et d’aller vers l’intégration d’une culture de sécurité pour un secteur qui semble l’ignorer.

(1 )Jean-Michel Décugis, François Malye, Jérôme Vincent, Les coulisses du 13 novembre, Plon, 2016
(2) Simon Leys, Les idées des autres, Paris 2005, p.38
(3) Assemblée nationale, proposition de loi N°3452, www.assemblee-nationale.fr, consulté en mars 2021.
(4) Mathilde Blayo, La Lettre du Musicien, article du 15/02/2021.

Auteur : Eric DARRIGRAND, auditeur de la 5ème promotion.

 

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